L'Europe « Parque » la pêche artisanale dans les 12 milles !

La Commission européenne « parque » la pêche artisanale dans les 12 milles avec l’aval du Parlement européen ?

Deux réunions importantes sur la réforme de la Politique Commune de la Pêche se sont télescopées le jeudi 25 février 2010. A Strasbourg, le Parlement européen concluait en séance plénière toute la procédure sur le Livre vert sur la réforme de la PCP. A Bruxelles, la Commission européenne organisait une réunion sur la pêche à petite échelle et la pêche côtière.

Dans la matinée du 25 février 2010, le Parlement européen (PE) a adopté à une large majorité (par 456 voix pour, 50 voix contre et 65 abstentions), une résolution sur le Livre vert sur la réforme de la politique commune de la pêche. Pour plus d'informations : Débat sur la pêche et l’aquaculture : En direct du Parlement Européen.

Le compte-rendu de la séance plénière du PE se termine par cette conclusion étonnante : « Le Parlement note enfin que la Commission reconnaît que la règle des 12 milles nautiques fonctionne généralement bien et que, en conséquence, un des seuls domaines où la PCP a donné des résultats relativement satisfaisants est là où les États membres ont pu exercer un contrôle. Il demande par conséquent que ce principe ait un caractère permanent. » (Source : Résolution sur le Livre vert sur la réforme de la politique commune de la pêche)

Tout droit vers un régime spécifique à la pêche artisanale

Dans le même temps, la Commission Européenne a organisé une réunion sur la pêche artisanale européenne à laquelle ont participé les États membres, le Parlement européen, les régions, le Comité économique et social, des armateurs, trois représentants des organisations professionnelles d’Europêche, COGECA, ETF, AOEP, deux représentants par Comités Consultatifs Régionaux (CCRs), et huit représentants du groupe de contact des ONGs.

L’ordre du jour de cette réunion clef est explicite :
  • Un régime spécifique pour la petite pêche artisanale côtière.
  • Une définition de la pêche artisanale côtière.
  • Alternatives pour une autre définition de la pêche artisanale côtière.
  • Mesures spécifiques pour gérer la pêche artisanale côtière.

« La Commission met en œuvre son grand projet dévoilé dans le Livre Vert de diviser la mer en deux parties l’une des 12 milles aux 200 milles soumise aux Quotas Individuels Transférables (QITs), l’autre de 0 à 12 milles constituée par la petite pêche artisanale soumise à un régime plus "communautaire" de gestion collective. Pourtant, dans la plupart des pays européens, la pêche artisanale occupe aussi la zone des 12 à 200 milles. » Extrait de l’article du Comité Local des Pêches du Guilvinec écrit avant la réunion de Bruxelles : Régime spécifique pour la pêche artisanale côtière, un article prémonitoire au Compte-rendu de la réunion de L’Encre de Mer : Petite pêche côtière artisanale : le « Happening » de la Commission - L’histoire d’un débat manqué.

En guise de conclusion : Si la Commission reconnaît que la règle des 12 milles nautiques fonctionne généralement bien et que, en conséquence, un des seuls domaines où la PCP a donné des résultats relativement satisfaisants est là où les États membres ont pu exercer un contrôle, nous demandons par conséquent que le "principe" soit étendu à une zone au-delà des 12 milles : 20, 30, 40,.... résultat d'une négociation entre les différentes pêcheries.

Autres articles :

Autres informations :

Compte-rendu succinct de la réunion du groupe de travail 1 (Ressources) du Comité Consultatif sur la pêche et l’aquaculture (CCPA) du 21 janvier 2010

Point 3 : Systèmes de gestion des droits de pêche

Le représentant de la Commission (DG MARE) répète rapidement les points principaux de la présentation faite deux jours plus tôt lors de la réunion des parties concernées et résume les principaux résultats de cette réunion :

  • L'introduction du/des système(s) QIT pour la flotte à grande échelle, avec des sauvegardes appropriées pour éviter une concentration des quotas, une spéculation, etc., pourrait être une option possible.
  • Néanmoins, ce faisant, la stabilité relative et la situation équitable d’un marché des droits (mis en œuvre par l’UE ou les États membres) devraient être prises en considération.
  • Pour la flotte à petite échelle, un système QIT pourrait être introduit à titre volontaire, soumis à des sauvegardes plus rigoureuses (par exemple, restreignant le marché, protégeant les flottes ou les communautés à petite échelle dépendantes de la pêche, etc.)

À la suite de cette présentation, un certain nombre de questions et remarques ont été présentées : Lire les nombreuses remarques sur les QIT

Autres informations : En 2000, un rapport Ifremer estimait que la bande des 12 milles représentait 50% des apports de la pêche en poids

Rapport sur l’exercice de la pêche dans la zone côtière de la France (Ifremer 2000)
Jacques Bolopion, André Forest, Louis - Julien Sourd

Un état des lieux a été dressé pour les trois façades maritimes métropolitaines (Manche, Atlantique, Méditerranée), pour les Antilles, la Guyane et pour la Réunion ce qui permet de tenir compte des spécificités propres à chaque secteur géographique. Sans entrer dans le détail ce bilan fait ressortir :

  • L’extrême diversité des usages de la ressource et des espaces dans cette zone : diversité des métiers pratiqués par la pêche professionnels, mais aussi diversité d’acteurs aux intérêts parfois divergents ;
  • La complexité de la réglementation de la pêche dans la zone côtière, les difficultés de son application (très nombreuses dérogations…) et, parfois, son non respect ;
  • Le manque notoire de moyens de l’organisation professionnelle pour jouer pleinement son rôle dans la gestion des ressources et des pêcheries ;
  • Le fait qu’une large part des flottilles de pêche (plus de 70 % en moyenne) exerce son activité exclusivement dans la zone des 12 milles ;
  • La prédominance de plus en plus marquée des arts dormants dans cette zone ;
  • L’importance de la production en provenance de la bande des 12 milles, de l’ordre de 50 % en poids (avec des variantes selon les façades) ;
  • Le rôle essentiel que jouent les zones littorales comme lieu de grossissement des juvéniles (nourriceries) de nombreuses espèces, dont certaines font l’objet d’une exploitation plus au large, mais aussi la faible protection de fait dont jouissent ces zones, notamment à cause de dérogations accordées dans la zone des 3 milles.

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