Marché du poisson : Massifier l'offre ?

Le lundi 4 mai 2009, nous lancions un appel : Entendez-vous le cri de détresse du patron pêcheur ? Ce pêcheur du Guilvinec interpellait les organisations professionnelles par rapport à la mévente du poisson. Depuis, les médias ont relayé une initiative bretonne dont l’objectif est de regrouper l’offre pour rééquilibrer le rapport de forces vis-à-vis de la grande distribution, en prenant exemple sur l’agriculture. Les quatre principales organisations de producteurs de Bretagne et les deux plus grosses entreprises de mareyage et de transformation ont engagé une réflexion dans ce sens. Certains parlent de « massification » ou d’« économie d’échelle » de l’offre par rapport à la demande.

Au moment de la crise du lait, production on ne peut plus massifiée au niveau national à travers moins d’une dizaine de coopératives laitières et de négociants-transformateurs, nous sommes en droit de nous interroger sur l’initiative bretonne initiée par les OP régionales, l’Opob, Cobrenord et Pêcheurs de Manche (From-Bretagne et Proma) et les deux plus grands mareyeurs bretons, Furic-Océalliance et Fipêche. Ce groupe en phase de réflexion « envisage de proposer une offre stabilisée et régulée, en prix et en quantités, sur la base d’un cahier des charges définis avec l’acheteur final. »

Dans le marché globalisé des produits de la mer, le terme de massification est très relatif. Que pèse la pêche bretonne dans l’approvisionnement national ? Que pèsent les 90% de quotas français de lotte (même s’il représente la moitié des quotas européens) face au saumon norvégien, le panga vietnamien, bientôt le tilapia chinois et autres productions de masse à venir. Que peut défendre ce regroupement régional face à des multinationales comme la société norvégienne, leader dans le saumon, Marine Harvest dont le chiffre d’affaires avoisine les 2 milliards d’euros (en comparaison, la production halieutique française, pêche, conchyliculture et pisciculture, se chiffre à 1,7 milliards d’euros).

Ce modèle de contractualisation avec les GMS, des prix stabilisés mais au rabais, ne peut concerner que les armements hauturiers et naturellement les deux mareyeurs qui en regroupant l’offre, consolideront leur position dominante pour tenter de rivaliser avec la déferlante étrangère.

Plutôt que de se jeter dans le gueule du loup, la pêche bretonne ou plus généralement la pêche artisanale française doit réfléchir à mieux valoriser ses produits de la mer, et les positionner dans la gamme des produits non pas de masse, mais de qualité, des produits frais, d’une grande diversité et d’exception « sauvage », avant qu’il ne soit trop tard.

Alternatives à la massification :

Sauvage et Bio : Le Conseil Régional de Bretagne porte une opération de produits alimentaires sans OGM où se sont positionnés indirectement les salmoniculteurs (et en particulier le norvégien Marine Harvest). Mais où sont donc les produits de la pêche bretonne dans ce guide Consommer sans OGM en Bretagne : Viandes, volailles, œufs, produits laitiers, poissons nourris sans OGM ? Biocoop, le plus grand réseau français de produits biologiques, tient une grande place dans les listes de fournisseurs par département, ses magasins distribuent du saumon bio d’Ecosse et d’Irlande. Dans la liste des produits de la mer uniquement des algues, des truites, du saumon,...!!!

Mode des sushis : Une filière spécifique de produits hautement frais et même vivants pourrait s’entrevoir avec des prix rémunérateurs.

Circuit court : Vente directe, AMAP,

Des produits bio dans les cantines. Pourquoi pas du poisson « sauvage » ?

Le rôle des épouses de pêcheur ? Enquête sur l’Evolution du rôle et du statut de la femme dans les activités maritimes dans le cadre du projet FEMMAR : programme de recherche initié par la région Pays de la Loire depuis janvier 2009. Ce projet a pour objectif d’étudier l’évolution du rôle et du statut de la femme dans les activités maritimes. Cette enquête étant faite à l’échelle européenne, une large diffusion du questionnaire et de nombreux entretiens sont nécessaires. Pour plus d’informations : le site du FEMMAR

En guise de conclusion : Pour connaitre les tendances massives qui se dessinent dans les années à venir, allez sur le site de la société néerlandaise : ANOVA. La Hollande est une importante plaque tournante du marché des produits aquatiques dans l'Union Européenne.

Philippe FAVRELIERE

Lire les autres articles :

Pour des informations complémentaires sur la pêche et la distribution des produits de la mer sur la façade Atlantique (Bretagne, Pays-de-Loire, Poitou-Charentes et Aquitaine) :

Information ajoutée le 2 juillet 2009

Pêche. Le modèle d'une meilleure rémunération (Le Télégramme)
Confrontés à des prix de vente bas, les pêcheurs bretons attendent une meilleure rémunération de leur travail. La solution pourrait venir d'un nouveau circuit de commercialisation.
Dans un marché dominé par les produits d'importation, la pêche bretonne voit sa marge de manoeuvre réduite. Organisations de producteurs et acheteurs (*) réfléchissent malgré tout à la manière de valoriser les espèces phares débarquées. L'objectif affiché est d'offrir une meilleure visibilité à l'ensemble des acteurs de la filière, jusqu'aux distributeurs, en garantissant des prix minimums qui ne soient pas au niveau des prix de retrait. «Le groupe de travail réfléchit à un système par lequel l'union constituée des producteurs et de partenaires «aval» choisis permettrait de proposer une offre stabilisée et régulée, en prix et en quantités, pour une ou plusieurs espèces. Mais il ne s'agit certainement pas de vider les criées», explique Tristan Douard, le directeur adjoint de Pêcheurs de Manche et Atlantique et porte-parole des quatre organisations de producteurs bretonnes.
Economie d'échelle
L'économie d'échelle (logistique et transformation) permettrait aux pêcheurs de bénéficier de meilleurs prix. Sans toucher aux tarifs affichés sur l'étal du poissonnier. Pour le directeur adjoint de PMA, «il n'est pas concevable qu'un bateau perde des milliers d'euros parce que le prix du kilo a perdu 1 € du jour au lendemain». Une réflexion conduite sur la lotte dont les débarquements bretons dominent la production française. Au stade actuel de la réflexion, les échanges soulèvent un grand nombre de questions. Il s'agit notamment de savoir s'il serait souhaitable de contractualiser ou pas, de fixer des prix et pour quelle partie de la pêche. Pas indifférent aux crises de marchés traversées par l'agriculture, le groupe de travail a justement décidé de se tourner vers le maraîchage et s'intéresse à la façon dont cette filière s'est structurée.
Une image à faire valoir
Au-delà du poisson, la filière bretonne entend faire valoir une image. «Nous avons des bateaux performants, respectueux de la réglementation, des quotas non négligeables sur certaines espèces et une qualité de travail à mettre en avant». Un nouveau modèle commercial qui pourrait être synonyme de bouffée d'oxygène pour une pêche à nouveau confrontée à la hausse du prix du gazole.
(*) Le groupe de travail réunit les quatre organisations de producteurs bretonnes, via leurs unions UBOP (OPOB et COBRENORD) et Pêcheurs de Manche et Atlantique (PROMA et FROM Bretagne), et deux des principaux opérateurs aval de la filière pêche bretonne, le groupe Furic et le groupe Fipêche.
Jean Le Borgne

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