Avec Avaaz, en marche pour le marché mondial du climat...

Les lois du marché sont en marche pour "sauver" le climat de la planète...

Illustration extraite du document édité par World Rainforest Movement (WRM) : 10 alertes sur REDD (ou Carbone bleu) à l'intention des communautés 

Une marche mondiale pour le climat organisée le 21 septembre 2014 par l’organisation étatsunienne Avaaz... Des centaines de milliers de manifestants battent le pavé partout sur la planète suite à l’appel d’Avaaz... La plus grande Marche pour le Climat de l'histoire, selon Avaaz... Cette marche citoyenne impulse un nouveau souffle avant le sommet extraordinaire sur le climat de  l’ONU, le 23 septembre... (1)

Pendant ce temps, des communautés villageoises sont expulsées de leurs territoires ancestraux... et d’autres fuient face aux catastrophes naturelles... Expulsion et fuite à l’origine de nouveaux opprimés,  les réfugiés climatiques !

De quel souffle nous parle Avaaz ? D’un souffle apolitique !

Cette mobilisation des non-militants témoigne du succès de la manifestation. Jouer sur une perception nouvelle de la gravité de la situation et la sortir des seules sphères politiques : c’était un parti pris, depuis le début, par Avaaz, coordinateur de l’événement et dont l’objet est d’animer des campagnes de mobilisation internationale sur internet : « Cette marche doit être un signal fort de la société civile à l’égard de ses dirigeants. C’est d’autant plus vrai en France, où le gouvernement doit prendre le leadership sur le climat en vue de la COP 21 à Paris en décembre 2015 », explique Marie Yared, chargée de campagne pour Avaaz. (extrait du compte-rendu de Reporterre (2))


Laurent Fabius, Ségolène Royal et Yan Arthus Bertrand marchaient à New York en compagnie de Ban Ki-Moon, secrétaire général de l'ONU...

Nous, nous marchions à La Rochelle...

Une marche rochelaise pour le climat téléguidée par Avaaz.

Rendez-vous à 13H00 sur la Place de Verdun. Un attroupement éclaté en petits ensembles timides semble en attente… d’un car pour un voyage organisé ? D’un guide pour une visite de La Rochelle ? Non, il s’agit d’une marche en faveur du développement des énergies renouvelables afin de protéger la Terre du dérèglement climatique. Un évènement provoqué par Avaaz le blog pétitionnaire.

L’initiative d’Avaaz compte susciter d’importants rassemblements partout dans le monde.

Sur la place de Verdun il n’y a pas de quoi remplir le quart d’une salle de cinéma. La plupart des  marcheurs ne sont même pas rochelais. Ils viennent de l’Ile d’Oléron, de Luçon, d’Etaules, de Melle, de Nieul, voilà qui entame légèrement la légende rochelaise évoquant  une ville rebelle.

Ceci dit, j’ai quelques aprioris tout frais concernant Avaaz. Des articles sur le site Kokopelli mettent en doute la partialité et l’honnêteté d’Avaaz, les actions de celle-ci seraient franchement pro américaine, par ailleurs les revendications écolo concernant la création de réserves marines seraient des projections d’écrans de fumée en vue de sécuriser des secteurs militaires et économiques stratégiques dans l’Océan Indien et l’Océan Pacifique. Un article parle même d’Avaaz comme d’une tête de pont de la CIA. (3)


Les théories du complot j’adore ça dans les X Files mais pas du tout dans la réalité, la paranoïa m’empêche de dormir. Cependant, me dire qu’un espion manipule des millions de gens derrière son ordinateur et s’esclaffe en regardant marcher les gogos c’est très gênant. Regards sur la Pêche et l’Aquaculture pense que cette marche mondiale tend à appuyer une « marchandisation de l’environnement » qui serait finalisée au sommet sur le climat à Paris en décembre 2015. Les industries se verraient octroyer une « licence » pour polluer moyennant des gestes pour la nature, du genre la plantation de forêts, l’achat de zone de mangrove etc…

Néanmoins, bien que dubitatif, mû par la curiosité et par une certaine volonté d’accomplir une bonne action héritée de mon expérience de scout, j’ai marché. Nous avons suivi l’étendard au cœur vert jusqu’aux deux tours après avoir pris des photos des manifestants arborant des slogans « La Rochelle aime la planète » ou  « Je vote pour le climat », d’autres photos sur la passerelle de la tour de la Chaîne, et encore sous la BNP de la Grosse Horloge et retour Place de Verdun.

J’ai rencontré des gens concernés par le devenir de la planète, conscients de l’urgence, inquiets de l’avenir, des personnes préoccupés d’action… mais quoi ? Est-ce le militant de Greenpeace qui a proposé de faire un kilomètre de plus ? De passer par la préfecture ? Un marathon pouvait-il changer quelque chose ? J’en doute. S’il faut courir, courrons après un projet. Voilà ce qui fait défaut, qui constitue une entrave à une action concertée de masse. Qui est à  même de contrecarrer la ruine de la planète par la production à outrance, l’exploitation aveugle des richesses naturelles, la dictature de la consommation et son corollaire démographique ? C’est une réflexion à conduire ensemble, et peut-être avec des acteurs de l’économie et de la finance qui sont au cœur d’un système centré sur lui-même, blindé, cuirassé, nuisible, et qui sont à même de le désamorcer.

Nous nous sommes dispersés au coin de la rue Gargoulleau... Je n'étais pas satisfait. FTZ

Les lois du marché sont en marche...

Des signes avant-coureurs ne trompent pas. Les lois du marché s’imposent de plus en plus comme principes de base dans la régulation du climat...

Carbone bleu. Comment expliquer l’embauche d’une jeune et dynamique businesswoman par la Convention Ramsar ? (4) Cette organisation internationale encadre les zones humides protégées : marais, mangroves, récifs coralliens... Vendre ce patrimoine naturel à des pollueurs-multinationales engorgés de CO2 et autres gaz à effet de serre, dans le cadre d’un nouveau marché de CO2, dénommé Carbone Bleu et impulsé par la Banque mondiale. D’ailleurs, Danone est un partenaire privilégié de Ramsar pour la richesse de ses mangroves, véritable puits de carbone !

Croissance bleue et économie verte...

Accaparement des mers...

Ce qu'il faut retenir du Sommet sur le climat de New York

Le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé à accélérer le développement du Fonds vert pour le climat et a généraliser les émissions d'obligations dites "vertes".

Illustration : Appel d'Avaaz pour sauver la planète contre le changement climatique

Plus de 120 dirigeants, près de 200 entreprises et de nombreuses ONG se sont réunis à New York, le 23 septembre 2014, à l'occasion du Sommet sur le climat des Nations Unis. Objectif: "changer de cap" pour ralentir le réchauffement climatique, selon les mots du Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon. Pas d'accord au programme, mais des déclarations d'intention sur les moyens d'enrayer les émissions de CO2, à un an de la conférence sur le climat de Paris en 2015 (Cop21).

Source : Youphil par Romain De Oliveira

Le Fonds vert pour le climat peine à décoller

Le Secrétaire général de l'ONU est revenu sur le Fonds vert pour le climat, en demandant aux Etats de s'engager à l'alimenter à hauteur de 100 milliards de dollars (78 milliards d'euros) par an d'ici 2020. Ce mécanisme financier, décidé en 2009 lors du sommet de Copenhague mais encore en développement, doit permettre d'aider les pays pauvres à s'adapter aux changements climatiques et à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES).

Pour le moment, "seulement" 2,3 milliards de dollars ont été récoltés, a indiqué Ban Ki-moon, alors que l'objectif est d'atteindre 10 milliards de dollars d'ici la fin de l'année 2014. Le président de la République François Hollande s'est engagé, de son côté, à verser près d'un milliard de dollars (780 millions d'euros) au Fonds vert d'ici 2018, selon Le Monde.

Ban Ki-moon a également rappelé son souhait de "fixer un prix pour le carbone", sans préciser exactement les modalités. La veille, la Banque mondiale avait annoncée l'initiative de 73 Etats et grandes villes de s'allier à plus de mille grandes entreprises pour taxer les émissions de CO2, et créer un système de quotas échangeables. Là encore, sans plus de précisions.

Accélérer les émissions d'obligations dites "vertes"

L'autre annonce importante de Ban Ki-moon concerne l'engagement de banques privées à émettre des obligations "vertes" (green bonds, en anglais), à hauteur de 20 milliards de dollars. Ces obligations doivent permettre de financer des projets environnementaux faibles en émission de carbone, ou des projets de développement des énergies renouvelables. Début septembre, l'Agence française de développement (AFD) a d'ailleurs émis ses premières obligations "vertes".

Les plus critiques (comme l'ONG Oxfam France) ne sortent pas rassurés de ce sommet. Pour eux, le fait que deux des principaux producteurs de gaz à effet de serre, la Chine et l'Inde, ne fassent aucune annonce concrète est mauvais signe. Le vice-Premier ministre chinois s'est contenté de déclarer que son pays allait "travailler avec d'autres pour construire un avenir meilleur". Quant à Barack Obama, il a affirmé que les Etats-Unis tiendraient leur engagement de réduire les émissions de GES de 17% d'ici 2020.

(4) Zones humides : Un nouveau chef de la communication au secrétariat Ramsar

Philippe Favrelière (actualisé le 5 octobre 2014)

Autres articles :

Pour aller plus loin...

Déclaration de Margarita sur le Changement Climatique

Changeons le système, pas le climat


Illustration copie d'écran du site Precop Social de cambio climatico

Déclaration de Margarita sur le Changement Climatique

Changeons le système, pas le climat

Source : Ritimo

Traduction de l’espagnol au français par Clémence Tavernier, Jonathan Rock, et Marie-Joe Martin, traducteurs bénévoles pour Ritimo.

Déclaration issue de la réunion préparatoire à la Pré COP Sociale sur le Changement Climatique, réalisée du 15 au 18 juillet 2014 sur l’Ile de Magarita, Vénézuela.

En quoi consiste la Pré-COP Sociale ?
Il s’agit de la première consultation publique mondiale qui proposera un dialogue entre les gouvernements et mouvements et organisations sociales du monde entier, afin d’établir les bases d’une alliance entre les peuples et les gouvernements face à la menace que représente le changement climatique pour l’ensemble de l’humanité. Elle se tiendra du 4 au 7 novembre 2014, au Venezuela. La présente déclaration rassemble les éléments fondamentaux que la société civile souhaite porter dans le cadre des négociations climatiques d’ici à la COP 20, qui aura lieu à Lima, en décembre 2014.

Nous, femmes et hommes représentants des organisations et mouvements sociaux réunis sur l’île de Margarita du 15 au 18 juillet 2014, engagés en faveur du buen vivir ("bien vivre", en français), du vivre en harmonie avec les écosystèmes de la planète comme voie pour faire face à l’actuelle crise environnementale et au changement climatique (qui en est l’une de ses illustrations les plus flagrantes) ; préoccupé-e-s par la dimension sociale trop longtemps ignorée de cette crise mais remplis d’espoir et de foi quant à la puissance créatrice des peuples, moteur indispensable au changement du système ; nous saluons et souhaitons la bienvenue aux processus sociaux qui se vivent et se construisent au sein de différents pays, communautés et modèles de société.

Puisqu’il existe une dimension sociale au changement climatique et un droit inaliénable des peuples à être les protagonistes de la construction de leurs propres destins ;

Puisque chaque pays vit dans un contexte historique particulier au sein d’un monde complexe, composé d’expériences et de visions diverses à partir desquelles naissent des initiatives transformatrices ;

Puisque la crise climatique est le résultat de systèmes de développement insoutenables et incompatibles avec le bonheur des peuples ;

Puisque le thème de l’environnement est un sujet politique et qu’il est du devoir des gouvernements et de la communauté internationale d’écouter les voix des peuples ;

Puisque ce sont les peuples qui subissent les conséquences du changement climatique, qui vivent et comprennent ses dimensions sociales. Puisque ce sont aussi eux qui ont la force morale et la capacité créatrice nécessaire pour changer de cap et aller vers des systèmes justes et soutenables qui rendent possible un bonheur durable respectueux des cycles de la nature ;

Puisque les pays en voie de développement sont confrontés à différents types de problèmes et souffrent davantage des conséquences liées au changement climatique que les pays développés ;

Nous déclarons,

Égalité intergénérationnelle et droits des générations futures

« Allons vers l’avenir, ramenons-le à nous et commençons à le semer ici »
Hugo Chavez

1. "L’homme et la femme se sont transformés en de monstrueux consommateurs, qui sont en train de consommer toutes les ressources que la terre nous a données". Carmona Genesis, 11 ans, représentante élue des Mouvements écologistes des enfants du Venezuela.

2. Nous devons partager nos expériences à travers le monde pour comprendre et construire de véritables solutions. Etre solidaires avec nos camarades d’autres parties du monde, c’est comprendre leur contexte, leur lutte pour la vie, la souveraineté et l’identité.

3. Le changement dépend de la capacité de notre génération à produire une contre-culture, afin de transformer le modèle de consommation en celui du bien vivre, celui de sociétés coopératives globales. Nous devons générer une contre-culture révolutionnaire. Le rôle des jeunes est d’ouvrir le chemin et de créer des brèches dans un système qui n’est pas durable.

4. La jeunesse doit être politisée et participer aux décisions. Le plus important est que la jeunesse ait la volonté et la capacité de transformer les choses. Nous devons changer le système et commencer à mobiliser nos meilleures forces. Il ne s’agit pas uniquement d’un sujet environnemental ; il s’agit d’un sujet profondément social, éthique, politique et culturel.

5. Nous devons changer notre perception du pouvoir et encourager des espaces divers et participatifs, ouverts à la pensée interculturelle. Nous devons passer du discours à l’action transformatrice.

6. Le monde a besoin de corrections avant que les dommages soient irréversibles. Nous dénonçons le manque de volonté politique des pays les plus riches.

7. L’éducation doit ressembler à la société dont nous rêvons. Elle doit être révolutionnaire, elle doit transformer la réalité. Si elle n’est pas capable de la transformer, elle ne sert à rien. La pierre angulaire des transformations est l’éducation et la communication.

8. Le thème de l’environnement doit être un pilier du parcours de l’étudiant. Il faut repenser la manière dont l’environnement et le changement climatique sont enseignés. Nous devons ouvrir de nouveaux espaces où il est possible de discuter des causes profondes de la crise environnementale. Les jeunes doivent encourager ces changements. Le système hégémonique craint d’avoir une population éduquée parce que cela remettrait en question les structures du pouvoir.

9. Le colonialisme continue à opérer. Le changement climatique intervient dans un contexte historique où un groupe de pays a fondé son développement sur des pratiques qui ont généré la crise environnementale actuelle, y compris le changement climatique, alors que d’autres souffrent des pires conséquences de cette crise. Les pays développés, responsables du changement climatique, tentent de faire dévier le débat vers des solutions technologiques ou de marché, se soustrayant à leurs responsabilités historiques.

10. Les luttes du Sud doivent être soutenues par les pays du Nord. Les pays riches doivent s’engager à chercher une solution au changement climatique, la jeunesse du Nord doit faire pression sur ses gouvernements. Il ne reste pas beaucoup de temps, alors le Nord dans son ensemble doit assumer sa responsabilité historique et les jeunes doivent faire pression pour que le changement se produise.

11. Nous avons besoin de revendiquer la notion de solidarité et de comprendre les différences entre les pays, leurs différents contextes historiques, le droit au bien vivre ainsi que les responsabilités qu’implique le développement. La transition ne peut se limiter à la réduction des émissions ; il faut que ce soit une transition équitable qui assure que les peuples du Sud ne seront pas affectés.

12. Nous devons créer nos propres rêves, oublier le rêve pervers du développementalisme, et trouver en nous l’inspiration. Nous devons partager une nouvelle histoire à partir de nos expériences.

Lire l’intégralité de la déclaration en français, en pdf, ci-dessous.

La déclaration est également disponible en anglais et en espagnol sur le site de la Pré-COP Sociale

Document joint : Déclaration de Margarita sur le changement climatique (texte intégral) 

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“Carbone Bleu” ou “REDD Bleu” : la marchandisation des territoires marins côtiers

Lutte contre le changement climatique : La restauration de mangrove dans les Pays du Sud représente des crédits carbone pour les grandes sociétés (qui diminuent ainsi leur empreinte CO2) - Photographie prise au Sénégal

“Carbone Bleu” ou “REDD Bleu” correspond au Carbone stocké dans les écosystèmes marins côtiers. Ce stockage a lieu de façon naturelle, en particulier par l’absorption de CO2 que font les plantes aquatiques. D’après les promoteurs de « Carbone Bleu », les écosystèmes marins côtiers riches en plantes, comme les mangroves, les prairies d’herbes marines et les marais salants piègent de grands volumes de Carbone de l’atmosphère et les stockent dans leurs sédiments et leurs sols. Les pays du nord  considère le « Carbone Bleu »  comme une alternative importante qui leur permet de « réduire » les émissions de carbone en payant pour que d’autres les réalisent. Les pays du sud, eux, y voient une opportunité pour obtenir de l’argent pour la conservation de leurs forêts. Selon l'ONGE World Rainforest Movement (WRM), les projets “Carbone Bleu” ou “REDD Bleu” représentent une nouvelle et grave menace pour les populations des forêts par la marchandisation des territoires marins côtiers...

Source : WRM

REDD est l’abréviation de Réduction des Emissions de la Déforestation et de la Dégradation des forêts. 


Nous appelons « territoires marins côtiers » les régions qui possèdent des mangroves et leurs zones d’influence, les prairies d’herbes marines et les marais salants. Dans ces territoires et dans leurs environs vivent des communautés qui dépendent des mangroves et d’autres écosystèmes marins côtiers pour leur survie.

1 - Qu’est-ce qu’un projet de « CarboneBleu » ou « REDD Bleu » ?

Ceux qui chercheront à se renseigner sur le « CarboneBleu » ou « REDD Bleu » découvriront que cela ressemble au système REDD (Réduction des émissions dues au déboisement et à la dégradation des forêts ; voir le site de WRM), que l’on propose depuis des années dans les forêts tropicales terrestres d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie. Dans le cas de « REDD Bleu », il s’agit du Carbone stocké dans les écosystèmes marins côtiers, et surtout dans les mangroves. Ce stockage a lieu de façon naturelle, en particulier par l’absorption de CO2 que font les plantes aquatiques. D’après les promoteurs de « REDD Bleu », les écosystèmes marins côtiers riches en plantes, comme les mangroves, les prairies d’herbes marines et les marais salants piègent de grands volumes de Carbone de l’atmosphère et les stockent dans leurs sédiments et leurs sols.

Les projets de « Carbone Bleu » ou « REDD Bleu » qui sont déjà en route sont généralement mis en œuvre dans une zone déterminée d’une mangrove, dans le but de la conserver ou de la restaurer. Comme dans les projets REDD pour les forêts terrestres (voir le Bulletin nº 184 du WRM), on vise à montrer que, par une incitation financière additionnelle, il est possible d’éviter les émissions de carbone ou d’accroître les stocks de carbone dans la zone du projet. Premièrement, on fait l’inventaire de la quantité de carbone qui serait « stockée » dans la zone du projet pendant une période déterminée. Par une série de calculs, on essaie de prévoir la quantité de carbone que contient la zone au début et à la fin du projet. Suivant la logique de REDD, il faut également prévoir la quantité de carbone que la zone du projet contiendrait à l’avenir si le projet n’avait pas existé. Ces calculs donnent pour résultat la quantité supposée de carbone que le projet va générer (les « crédits carbone »), mais il est impossible de les faire avec précision (1). Suivant la logique du marché du carbone, l’acheteur de ces « crédits » aurait le droit de continuer à émettre la quantité de CO2 que le projet permettrait de « stocker ». Dans la pratique, la réduction des émissions de CO2 est nulle, parce que le carbone censément « stocké » dans la zone de la mangrove sera émis ailleurs par l’entreprise acheteuse des « crédits ».

Les promoteurs d’initiatives de « CarboneBleu » ou « REDD Bleu » espèrent que les marchés du carbone pourront produire à l’avenir l’argent nécessaire pour financer leurs projets. C’est pourquoi ils font de fortes pressions pour que « REDD Bleu » soit inclus dans un accord international sur REDD, au cours des conférences climatiques annuelles de l’ONU dans le cadre de la CCNUCC : les dénommées CdP du climat. Les gouvernements du Costa Rica, de Tanzanie, d’Indonésie et de l’Équateur ont déjà inclus les mangroves dans leurs politiques nationales sur REDD (2).



Les arguments des promoteurs du « CarboneBleu » ou REDD Bleu et les réponses

Les promoteurs du « CarboneBleu » ou « REDD Bleu » se servent d’une série d’arguments pour défendre cette idée. Nous allons en mentionner quelques-uns et chercher à y répondre.

Argument 1 : les écosystèmes marins côtiers sont capables d’absorber beaucoup de carbone, plus que les forêts terrestres, et les connaissances scientifiques disponibles pour mesurer qui sont suffisantes

D’après le portail internet « Carbone Bleu » (3), « Les taux de piégeage et de stockage de carbone sont comparables aux taux de piégeage d’écosystèmes terrestres tels que les forêts tropicales ou les tourbières et, souvent, ils sont même plus importants ». On affirme également que, « à la différence de la plupart des écosystèmes terrestres, qui atteignent l’équilibre du carbone au sol en quelques décennies, le dioxyde de carbone peut continuer à se déposer dans les sédiments d’un écosystème côtier pendant des milliers d’années ». Des études menées par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et par l’Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) suggèrent que « 7 % des réductions des émissions de dioxyde de carbone (CO2) nécessaires pour  maintenir la concentration de ce gaz dans l’atmosphère au-dessous de 450 ppm (une valeur qui, pour la plupart des scientifiques, nous donnera 50 % de possibilités de maintenir le réchauffement planétaire dans la limite de 2 degrés)  peuvent suffire à protéger et à récupérer des mangroves, des marais salants et des prairies marines, soit la moitié de ce qu’on espère obtenir avec REDD [dans les forêts terrestres] ». C’est pourquoi les promoteurs du « CarboneBleu » affirment qu’il s’agit d’un « instrument transformateur pour la gestion du carbone naturel à l’échelon mondial » (5).

Les promoteurs du « CarboneBleu » affirment aussi que « de nos jours, les connaissances scientifiques sur le piégeage de carbone et sur les émissions potentielles des écosystèmes côtiers sont suffisantes pour développer des incitations favorables à une gestion efficace et des politiques pour la conservation du carbone Bleu côtier ». (6)

Réponse à l’argument 1 :

Premièrement, les projets de « REDD Bleu » utilisent le même système de calcul des émissions des projets REDD pour les forêts terrestres, et ces calculs ne sont pas fiables. Il y aura toujours une quantité approximative de carbone au début d’un projet, et une estimation assez subjective de la quantité de carbone qui aura été « stocké » à la fin du projet. En outre, les scientifiques se heurtent à beaucoup de difficultés pour arriver à comprendre les processus de stockage de carbone. D’après Gabriel Grimsditsch, fonctionnaire du programme des écosystèmes marins du PNUE, « il existe des incertitudes considérables quant à ces estimations et à la compréhension du stockage de carbone dans les écosystèmes côtiers ». (7)

Les « phrases à effet » qu’utilisent les études et les projets pour parler de volumes de « CarboneBleu » qui seraient stockés sont révélatrices de ces incertitudes. Tandis que l’Initiative pour le « CarboneBleu » affirme que le taux de piégeage de carbone des mangroves serait de « deux à quatre fois plus important que les taux observés dans les forêts tropicales du monde » (8), la FundaciónNeotrópico qui développe un projet-pilote de « CarboneBleu » au Costa Rica affirme que les zones côtières et marines, telles que les mangroves et d’autres marais, « stockent jusqu’à cinq fois plus de carbone que les forêts tropicales » (9).

Quant à la publicité sur le « CarboneBleu », elle fait peu de références à l’incidence des changements climatiques existants sur les océans et les zones marines côtières et aux fonctions vitales que ces derniers accomplissent. On sait que l’augmentation du piégeage de CO2 de l’atmosphère par les océans a augmenté l’acidité de l’eau. À long terme, la présence de davantage de carbone dans les océans peut avoir une série d’effets qui non seulement vont interférer avec la capacité des océans de piéger du CO2 mais vont stimuler le processus inverse, c’est-à-dire l’émission de carbone par les océans. Ces processus sont encore peu étudiés et mal compris, de sorte que l’incertitude est encore plus grande quant à ce qui se passera avec le « CarboneBleu » à l’avenir. Pourtant, toutes ces incertitudes n’ont pas empêché la mise en œuvre de quelques initiatives qui arrivent même à paraître absurdes.

Les absurdités du « CarboneBleu »

Sous prétexte que les océans sont « les endroits les plus prometteurs pour piéger du carbone », le Centre de recherches sur le piégeage de carbone des océans du Département de l’énergie du gouvernement des États-Unis, dont le siège est à Berkeley, a mené une étude sur l’injection directe de CO2 à une profondeur de 1 000 mètres ou plus, dans des stations situées sur la côte ou dans la mer, avec des bateaux qui disposaient de tuyaux suffisamment longs. Une autre technique étudiée est la dénommée « fertilisation » des océans avec des particules de fer minuscules (nanoparticules) pour stimuler la fixation de carbone que fait le phytoplancton (10). En 2007, une commission scientifique intergouvernementale avait prévenu que la fertilisation des océans avec du fer pour augmenter le piégeage de carbone de façon commerciale comportait « des risques pour l’environnement, et il n’existe pas de preuve scientifique de son efficacité ». Cette déclaration répondait à une tentative de l’entreprise PlanktosInc de lancer 100 tonnes de fer dans une zone de 10 000 km2 du Pacifique, dans le but de pouvoir vendre des crédits carbone (11).


Argument 2 : les territoires côtiers et marins sont en train de se détruire rapidement à cause de la mauvaise gestion

(...)

Argument 3 : les territoires marins côtiers ont une grande valeur monétaire en raison de la valeur de leurs « services écosystémiques », et la reconnaissance de cette valeur peut assurer leur conservation

(...)

La valeur des mangroves pour les communautés et pour la nature en général

(...)

3 - Quelques initiatives importantes de « CarboneBleu » ou « REDD Bleu », et ceux qui les ont lancées

En 2009, la transnationale française Danone, avec l’UICN (16) et RAMSAR (17), a organisé la restauration de quelque 4 700 ha de mangroves, à Casamans et Sine Saloum, au Sénégal. Elle a entrepris aussi un projet de récupération de mangroves sur près de 6 000 ha aux Sundarbans, en Inde. L’entreprise rapporte qu’il s’agit d’un investissement d’environ 23 millions d’euros, qui va générer entre 6 et 11 millions de tonnes de crédits carbone par an, sur une période de 23 ans (18). L’entreprise peut utiliser ces crédits pour « compenser » ses propres émissions, ou les revendre sur les marchés du carbone.

(...)

4 - Activités prioritaires des promoteurs du « CarboneBleu »

(...)

5 - Comment conserver les territoires marins côtiers ?

(...)

Winnie Overbeek, winnie@wrm.org.uy
World RainforestMovement

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Le 26 Septembre 2014

Sommet mondial pour le climat : un effort massif des investisseurs


Les décideurs économiques et financiers sont venus nombreux entourer Ban Ki Moon, le secrétaire général des Nations Unies, au sommet pour le climat organisé à New York le 23 septembre. Pour l’occasion, près de 350 investisseurs du monde entier se sont engagés à "décarboner" leurs investissements. Ce signal fort, envoyé par des acteurs financiers qui gèrent plus de 24 000 milliards de dollars, a pour but de réorienter progressivement l’économie vers des modèles moins émetteurs de gaz à effet de serre. Focus sur les motivations des signataires français.

Source : Novethic par Anne-Catherine Husson-Traore

La déclaration des investisseurs contre le changement climatique (Global Investor Statement on Climate Change), publiée le 23 septembre, montre qu’ils sont de plus en plus nombreux à prendre conscience de l’impact du changement climatique sur leurs portefeuilles. Venus de tous horizons, ils donnent ainsi une traduction concrète à leurs préoccupations. Sous l’égide d’une coalition d’organisations engagées dont  l’initiative finance des Nations Unies (Unep FI), l’impulsion a été donnée par deux investisseurs, le fonds de pension suédois AP4 et la société de gestion française Amundi. Ils ont obtenu un engagement de plusieurs dizaines de leurs pairs à "décarboner" leurs investissements. Mais que signifie concrètement cette annonce spectaculaire ?

Pour les signataires français de la déclaration, parmi lesquels on compte la Caisse des dépôts (dont Novethic est une filiale) et les acteurs publics de la retraite – Fonds de réserve pour les retraites (FRR), l’Erafp et l’Ircantec –, il s’agit de s’inscrire dans un processus à long terme.

1 / Première étape : la reconnaissance du caractère impératif qu’a le financement de la transition énergétique pour les investisseurs.

Pour l’Ircantec, qui gère la retraite complémentaire de la fonction publique, "des capitaux importants sont nécessaires pour financer la transition énergétique et l’adaptation aux impacts du changement climatique". L’institution s’engage donc à contribuer au financement d’une économie plus respectueuse de l’environnement. Mais les modalités de ce financement restent à préciser.

2 / Deuxième étape : la mesure de son empreinte carbone.

Il s’agit de disposer d’une vision juste du volume d’émissions de gaz à effet de serre générées par les entreprises dont on en est actionnaire. L’Erafp a ainsi évalué ses investissements actions en mars 2014 et estime que cet outil de pilotage doit être généralisé, au moins pour tous les investisseurs publics. Selon son directeur, Philippe Desfossés, qui a fait le déplacement à New York : "Les politiques doivent définir un cap qui envoie le bon message aux investisseurs sur l'augmentation du prix du carbone ou de l'énergie. Mais nous devons aussi sélectionner dans nos portefeuilles les entreprises les plus vertueuses sur des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). De grands investisseurs comme nous ne peuvent pas uniquement financer des fermes solaires ou éoliennes, ils doivent contribuer à améliorer l’économie telle qu’elle est actuellement."

3/ Troisième étape : inventer de nouvelles façons d’investir pour diminuer l’intensité carbone de ses portefeuilles.

C’est la stratégie adoptée par le Fonds de réserve pour les retraites (FRR). Il a construit, en partenariat avec AP4, Amundi et le fournisseur d’indices MSCI, des indices boursiers bas carbone. Ces indices sélectionnent des entreprises dans tous les secteurs parce qu’elles émettent moins de carbone que leurs concurrentes. Cela se calcule en rapportant le volume d’émissions à celui du chiffre d’affaires. Le Fonds de réserve pour les retraites va investir 1 milliard d’euros sur ces nouveaux indices qui étaient auparavant placés sur des indices classiques construits en fonction de la capitalisation boursière comme le CAC 40. "Nous avons eu une approche complexe, explique Yves Chevalier, membre du directoire du FRR. Pour 'décarboner' des portefeuilles, le premier réflexe est d’exclure les compagnies pétrolières. Mais tant que l’économie reposera sur cette énergie cela n’est pas adapté. Nous avons donc sélectionné les moins intensives en carbone dans tous les secteurs et envoyé ainsi un message global : le changement climatique et les problèmes environnementaux conditionnent notre modèle économique et, donc, la rentabilité future de nos investissements."

4/  Quatrième étape : le financement de l’économie verte.

Une autre déclaration a été publiée le 23 septembre. Des investisseurs représentant 2 000 milliards de dollars ont appelé à ce que les "green bonds et les climate bonds", obligations qui servent à financer des projets de verdissement de l’économie, atteignent les 100 milliards de dollars. Ils ont dans le même temps demandé aux entreprises et aux gouvernements de lancer des projets correspondant à ces montants. D’autres options sont proposées, comme  celle de dédier un pourcentage des réserves des institutions de retraite au financement de la transition énergétique.

Et maintenant ?

Le mouvement prend corps. La France saura-t-elle prendre le relais alors que tous les regards se tournent vers elle en tant qu’organisatrice de la COP 21 ? Il faudrait au minimum qu’elle incite fortement les investisseurs institutionnels français à verdir leurs investissements à travers la réalisation d’empreinte carbone. A ce jour, un tel dispositif n’est pas intégré dans le projet de loi sur le financement de la transition énergétique.

Anne-Catherine Husson-Traore


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Le 24 Octobre 2014

Climat : l'UE signe un accord historique contre les gaz à effet de serre



INFOGRAPHIE - Les pays membres de l'Union européenne se sont engagés à réduire de 40% ses gaz à effet de serre d'ici 2030
L'Union européenne a trouvé un accord historique ce vendredi sur son plan climat prévoyant une réduction d'au moins 40% de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.


"Accord du Conseil européen sur une politique énergétique et de climat la plus ambitieuse au monde", a écrit le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, sur son compte Twitter.

L'accord a été obtenu à l'issue de discussions ardues qui ont duré près de huit heures à Bruxelles.

Outre la reduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, les 28 chefs d'Etat et de gouvernement se sont entendus sur deux autres objectifs: porter la part des énergies renouvelables à 27% de la consommation et faire 27% d'économies d'énergie par rapport à 1990. Le premier est contraignant au niveau de l'UE, mais pas le second.

"L'Europe montre l'exemple"

Les Européens, poussés notamment par l'Espagne et le Portugal, ont aussi décidé d'augmenter les objectifs d'"interconnexions" entre réseaux électriques au sein de l'Union, pour les porter à 15%.

"C'est une bonne nouvelle pour le climat, les citoyens, la santé et les négociations internationales sur le climat à Paris en 2015", a dit Herman Van Rompuy, assurant que cela créerait "des emplois durables" et de la "compétitivité".

"Avec la crise en Ukraine et les troubles au Moyen-Orient, il est devenu très clair à quel point il est urgent et vital de réduire la dépendance énergétique de l'Europe", a-t-il rappelé.

"L'Europe montre l'exemple", s'est félicité le président français François Hollande. "S'il n'y a pas d'accord" entre Européens, "comment convaincre les Chinois ou les Américains ?", avait-il demandé à son arrivée au sommet.
Les écologistes déçus

Mais les défenseurs de l'environnement sont déçus. "Les dirigeants de l'UE donnent un coup de frein à l'énergie propre", a dénoncé Greenpeace.

Les objectifs "sont bien en deçà de ce qui pourrait être fait par l'Europe pour combattre le changement climatique", ont estimé les Amis de la Terre. Pour Oxfam, "une action insuffisante de la part des pays les plus riches fait peser le fardeau sur les populations les plus pauvres, les plus affectées par le changement climatique et les moins responsables de cette crise."

>> Retrouvez ci-dessous la carte des émissions de gaz à effet de serre dans le monde en tenant compte de la population "World of emissions, world of inequalities (iied / Oxfam)


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Conseil européen (23 et 24 octobre 2014)

Cliquer Ici pour télécharger "Conclusions sur le cadre d'action en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030"

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Paquet énergie-climat : les 28 chefs d’Etats de l’Union s’accordent sur des objectifs minimum



C’est tard dans la nuit de jeudi à vendredi, que les 28 chefs d’Etats réunis en Conseil européen se sont accordés sur le Paquet énergie-climat. Celui-ci doit fixer la feuille de route européenne en matière de lutte contre le changement climatique et de réduction de la dépendance énergétique de l’Union européenne à horizon 2030. L’accord, qui a fait l’objet d’intenses tractations, est considéré comme "ambitieux" et "juste" par le président du Conseil. "Insuffisant" et "décevant" par les associations environnementales.

Source : Novethic par Béatrice Héraud

C’est un paquet énergie climat amoindri qui est ressorti des négociations du conseil européen d’hier soir (23 octobre 2014).

Les chefs d’Etat et le président du Conseil, Herman Van Rompuy, présentent l’accord arraché dans la nuit comme la "politique énergétique et de climat la plus ambitieuse au monde". C'est notamment la teneur du message posté par Herman Van Rompuy sur Twitter.

Pourtant, certains objectifs définis par les chefs d'Etat et de gouvernement ont subi un coup de rabot par rapport à l’ambition initiale et le projet de la commission sur lequel les négociations s’appuyaient. Ces objectifs sont au nombre de trois. Ils portent respectivement sur la réduction des émissions des gaz à effet de serre, l’amélioration de l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables.

Trois objectifs

Deux d’entre eux, les -40% d’émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 et les +27% (au minimum) d’énergies renouvelables à la même échéance n’ont pas bougé par rapport au projet présenté par la Commission en janvier dernier. A l’époque, ils ne satisfaisaient pas les associations environnementales qui trouvaient les chiffres trop faibles et leur niveau de contrainte insuffisant.

C’est toujours le cas aujourd’hui, même si une avancée a tout de même été obtenue. Les émissions devront être réduites "d’au moins 40%", ce qui permet à l’Union de pouvoir arriver avec une ambition supérieure à la Conférence de Paris sur le climat, qui se tiendra en 2015 même si, à ce stade, une telle éventualité paraît peu plausible.


Deux blocs face à face

Le changement vient du dernier objectif, sur les économies d’énergie. Au départ il avait été laissé de côté et délégué à la révision de la directive sur l’efficacité énergétique. Mais depuis quelques mois, c’est le chiffre de -30% d’ici 2030 qui circulait. Celui-ci a finalement été réduit à "au moins -27%". Il s'agit d'un compromis, fruit des profondes divergences entre les pays: Angleterre, Pologne et pays de l’Est d’un côté, Allemagne, France, Danemark… de l’autre.

Ce chiffre de -27% n’est du reste qu’"indicatif, il "sera réexaminé d’ici à 2020, dans l’optique d’un objectif de 30% pour l’UE". Mais là encore, pour les associations environnementales le compte n’y est pas: cela "se traduira par un ralentissement des progrès dans ce domaine après 2020, par rapport aux tendances actuelles. En mettant un frein aux économies d’énergie, les gouvernements perdent une occasion unique d’améliorer la sécurité énergétique de l'Europe et de promouvoir des centaines de milliers de créations d’emplois", estime le Réseau Action Climat.

Même son de cloche du côté des Amis de la Terre: "L’objectif n'envoie en effet pas le signal requis pour mettre fin aux énergies fossiles et amorcer la transition énergétique européenne. C'est aussi irréaliste par rapport à l’objectif de réduction des émissions de l’Union européenne de 80 à 95% en 2050: en 2030, il ne restera plus que vingt ans à l'Europe pour réduire de 55% ses émissions."

Trois principes

Selon le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, trois principes ont guidé les négociations. "D’abord, la justice: tous les pays contribuent, selon leur niveau de prospérité et leur capacité. Deuxièmement, la solidarité: avec un soutien pour les pays à plus faible revenu, à travers des objectifs adaptés et des fonds additionnels pour les aider à réussir leur transition vers une énergie propre. Troisièmement, la frugalité: l’argent devra être dépensé de manière la plus rentable possible, dans une perspective européenne."

Concrètement, cela se traduit par la mise en place de mécanismes complexes destinés aux pays les plus en peine économiquement, tels que des transferts de quotas de CO2 pour les Etats à faible revenu, la création d'un fonds alimenté par 2% des ventes de certificats du système des quotas européens d’émissions de CO2, une répartition de l’objectif de -40% par Etat selon le "PIB par habitant relatif" et une meilleure interconnexion européenne des réseaux de gaz et d’électricité pour les Etats baltes (pour une plus grande indépendance vis-à-vis du gaz russe), l’Espagne et le Portugal.

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Sommet européen des 23 et 24 octobre : « énergie - climat, l’Europe doit trouver un accord »



Réunis à Bruxelles, les 28 Etats membres doivent trouver un accord pour définir la politique énergétique et climatique de l’Europe jusqu’en 2030.

Source : Ministère de l'écologie

Le cadre énergie-climat 2030 en discussion comporte trois objectifs :
  • Réduire de 40% les émissions de gaz à effets de serre (GES) de l’Union européenne par rapport à 1990
  • Porter à 27% la part des énergies renouvelables (ENR) dans la consommation
  • Améliorer de 30% l’efficacité énergétique

Interrogée hier à l’Assemblée nationale sur ce sommet, Ségolène Royal a déclaré « L’Europe a une responsabilité à l’égard de la planète et ses dirigeants doivent avoir la force de s’accorder sur les objectifs fixés en matière de climat ».

La ministre a également rappelé que la France soutenait le cadre proposé par la Commission européenne. "L’accord n’est pas gagné, parce que beaucoup de pays ont des difficultés énergétiques, certains ont même rouvert des mines de charbon, d’autres ont des difficultés pour investir dans le renouvelable". Mais je pense que les chefs d’Etat et de gouvernement vont faire preuve de responsabilité car l’Europe a un message aussi de civilisation à donner au reste du monde".

Ce nouveau cadre énergie-climat projette à l’horizon 2030 les engagements pris par l’Union européenne avec le précédent paquet en vigueur jusqu’en 2020 (les3 x 20 % : -20 % de GES, 20% d’ENR, 20% d’efficacité énergétique). Il renforce à la fois sa lutte contre le dérèglement climatique, sa sécurité énergétique et sa compétitivité. La maîtrise de nos consommations énergétiques, et le développement d’énergies renouvelables, non émettrices de CO2 et produites localement, sont des paramètres indispensables pour réduire la dépendance énergétique de l’UE et garantir sa sécurité énergétique. Ce nouveau cadre européen devra également favoriser le développement de projets énergétiques porteurs d’innovation, de croissance économique et d’emplois.

Ces objectifs devront placer l’Europe à la pointe de la transition énergétique mondiale. Ce nouveau cadre constituera l’engagement de l’UE dans les négociations internationales notamment pour la COP21 qui se tiendra à Paris en 2015.

Ségolène Royal a expliqué que "le reste du monde regarde, pour savoir si l’Europe aura la force, l’intelligence, la sagesse de se mettre d’accord sur des objectifs communs". "De l’accord qui sortira demain dépendra le dégagement d’un nouveau souffle pour obtenir à Paris des engagements concrets et opérationnels"

Grâce au projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, la France est l’un des Etats membres de l’Union européenne les plus engagés dans la transition énergétique et la lutte contre le dérèglement climatique. Il traduit l’ambition française dans le cadre des négociations internationales.
Les objectifs fixés par le projet loi « transition énergétique »
- Réduction de 40 % de nos émissions de gaz à effet de serre en 2030 et division par quatre en 2050, par rapport à 1990.
- Objectif de porter la production d’énergie renouvelable à 32 % de notre consommation énergétique finale en 2030.
- Réduction de moitié de la consommation d’énergie à l’horizon 2050 par rapport à 2012. Objectif intermédiaire de diminution de notre consommation d’énergie de – 20 % en 2030
- Diversifier la production d’électricité et baisser la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2025.

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Octobre 2014

Filière forêt-bois : Séquestration ou substitution ?

La prise en compte des enjeux forestiers dans la lutte contre le changement climatique : leçons de la modélisation de filière forêt-bois française

Sylvain Caurla et Philippe Delacote

Chaire Economie du Climat

Substitution et séquestration, les deux leviers physiques d’atténuation des GES dans la filière forêt-bois


La séquestration : la gestion des surfaces forestières influence la quantité de carbone séquestré dans la biomasse forestière. Densification des forêts, afforestation, reforestation et diminution de la déforestation permettent d’augmenter la séquestration nette de carbone dans les écosystèmes forestiers. En outre, la séquestration du carbone dans les produits bois à longue durée de vie, les charpentes par exemple, retarde le retour du carbone dans l’atmosphère (levier séquestration sur l’illustration).

La substitution : les émissions liées à la consommation de produits bois sont généralement plus faibles que celles entraînées par la consommation de produits non-bois substituts. La consommation de produits bois-énergie (en substitution aux énergies fossiles) et la consommation de certains produits bois (en substitution aux produits issus d’autres filières pour la construction, l’isolation, l’emballage ou le mobilier) permettent par conséquent de réduire les émissions d’origine fossile (levier substitution sur l’illustration)

Dans le cadre des politiques visant à atténuer les émissions de gaz à effets de serre, la France s’appuie aujourd’hui largement sur la substitution énergétique. Cela se traduit par la mise en place de plans d’aide à la mobilisation de bois-énergie ou à la production de chaleur issue de biomasse.

En revanche, l’action de l’Etat ne repose pas, à ce jour, sur des mesures privilégiant la séquestration du carbone en forêt du fait de la prise en compte très partielle de la séquestration in situ dans les politiques climatiques internationales découlant du Protocole de Kyoto. Des chercheurs du laboratoire d’économie forestière de Nancy ont développé le French Forest Sector Model (FFSM), un modèle bioéconomique de la filière forêt-bois française, utilisé pour des simulations de politiques climatiques et l’analyse de leurs impacts.

Les premiers résultats du modèle FFSM montrent que :
  • Une politique ambitieuse de substitution peut être à l’origine de tensions sur la ressource et sur les marchés du bois d’industrie.
  • Une politique de séquestration présente un meilleur bilan carbone à l’horizon 2020 qu’une politique de substitution.
  • La mise en place d’une taxe carbone généralisée aurait un effet globalement positif sur la filière forêt-bois française.

Cliquer Ici pour télécharger "La prise en compte des enjeux forestiers dans la lutte contre le changement climatique : leçons de la modélisation de filière forêt-bois française"

Pour plus d'informations : Chaire Economie du Climat 

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Les instruments économiques et la conférence Paris-Climat 2015 : Le catalyseur de la tarification du carbone

Contexte

Les négociations sur le changement climatique ont démarré en 1992, et sont marquées par une conférence internationale annuelle appelée Conférence des Parties, ou COP.

La COP 19 a eu lieu à Varsovie fin novembre 2013, tandis que le Pérou se charge de la 20ième conférence, à Lima, en décembre 2014.

Paris organisera la 21ième conférence, au Bourget, début décembre 2015.

Le catalyseur de la tarification du carbone

Christian de Perthuis, Pierre-André Jouvet, Raphael Trotignon, Boris Solier, Bénédicte Meurisse, Simon Quemin

Source : Chaire Economie du Climat

Comme l’a montré l’action collective pour la protection de la couche d’ozone dans le cadre du protocole de Montréal, la réussite d’un accord multilatéral repose sur trois piliers : un engagement politique fort, un dispositif de suivi indépendant et rigoureux, des instruments économiques qui envoient les bonnes incitations. Pour être un réel succès, la conférence Paris climat de 2015 devra réaliser des avancées sur chacun de ces trois piliers. La Chaire Economie du Climat a concentré ses moyens de recherche sur le pilier des instruments économiques.
  • Le cinquième rapport du GIEC indique sans équivoque que tous les grands émetteurs de gaz à effet de serre doivent participer dès 2020 à l’effort global de réduction d’émission pour limiter les risques d’un réchauffement moyen de plus de 2° C.
  • Pour infléchir drastiquement les trajectoires d’émission, une tarification mondiale du carbone doit rapidement être mise en place, afin de pousser les gouvernements à jouer un jeu coopératif et inciter les acteurs économiques à réduire leurs émissions au plus faible coût.
  • Pour inciter les gouvernements à rejoindre un accord universel, une tarification du carbone de type bonus-malus, calculée sur la référence des émissions moyennes par tête, pourrait être introduite à un taux de 7-9 dollars par tonne de CO2 eq dès 2020.
  • Pour introduire un prix international du carbone dans l’économie, la voie la plus réaliste consiste à poser les bases, entre 2015 et 2020, d’un marché transcontinental du carbone, à partir des prototypes développés en Europe, en Chine et aux Etats-Unis.
  • La mise en place de la double tarification du carbone s’inscrirait dans la cadre du principe de la « responsabilité commune mais différenciée » qui vise à concilier l’action commune face au changement climatique et la priorité de l’accès au développement.
 
Chaire Economie du Climat - Palais Brongniart, 4e étage — 28 Place de la Bourse, 75002 Paris, France
Tel. : +33 (0)1 73 01 93 42 - Fax : +33 (0)1 73 0193 28

Cliquer Ici pour accéder aux publication de la Chaire Economie du Climat


Des experts proposent un marché transnational du carbone pour résoudre le défi climatique

La Chaire Économie du Climat propose que les pays dont les émissions par habitant excèdent la moyenne mondiale règlent la note de leur surplus aux pays les plus sobres. Un projet simple, mais ambitieux.

Source : Euractiv

« Quand on parle de Paris Climat 2015, tout le monde dit qu’il faut un accord crédible et ambitieux…certes, mais que mettre à l’intérieur ? »

C’est partant de ce constat que la Chaire Économie du Climat, qui fait partie de l'Université Paris Dauphine, a décidé de mettre une proposition concrète sur la table : celle d’un système de bonus-malus international sur le carbone. L’idée étant de faire payer aux pays les plus émetteurs de carbone une taxe sur leur « trop-plein », c’est-à-dire sur le C02 émis en surplus de la moyenne mondiale. Chaque habitant de la planète émet aujourd’hui en moyenne 6,3 tonnes de Co2 par habitant et par an, mais ce chiffre cache de fortes disparités : 0,8 tonnes pour un Bangladais, mais 21 tonnes pour un Américain.

Responsabilité commune mais différenciée

« Il faut reconsidérer le principe de responsabilité commune mais différenciée sur le climat, sur lequel le protocole de Kyoto a été construit. C’est ce principe qui a pourri les négociations en induisant une interprétation binaire » assure Christian de Perthuis, président du conseil scientifique de la Chaire.

Dans le cadre du protocole de Kyoto, certains pays considérés comme les pollueurs historiques ont été classés dans l’Annexe I, comme l’Europe, les États-Unis et le Japon, alors que l’Annexe II accueillait les émergents et les pays en développement. Cette distinction manichéenne a eu des effets pervers : les responsables des émissions passées ont été montrés du doigt, sans que les transferts Nord–Sud de 100 milliards d’euros évoqués à Copenhague ne se concrétisent. Et entre temps, le paysage s’est complexifié  : la Chine émet aujourd’hui quasiment autant de CO2 par habitant que l’Europe par exemple.

Sauver le marché du carbone européen

Pour le marché du carbone européen, actuellement en déshérence, ce système pourrait représenter une porte de sortie.

« L’Europe a toujours été moteur, certes…mais quand on voit ce qu’il se passe en Chine, où  des expériences de marché du carbone portent déjà sur des régions de 300 millions d’habitants, on comprend que l’Europe va rapidement être dépassée sur le sujet » assure Pierre-André Jouvet, le directeur scientifique.

La création d’un marché du carbone international permettrait en revanche au mécanisme européen de sortir de l’ornière. Car malgré ses nombreux déboires, le marché du carbone européen a fait des émules : il existe aujourd’hui des exemples aux États-Unis et en Chine. Les relier permettra d’assigner une valeur au carbone, un but qui fait aujourd’hui consensus chez les experts du climat et les militants écologistes. Mais dans les faits,  émettre du dioxyde du carbone reste gratuit dans une majorité de pays, ce qui entraîne une course effrénée aux énergies fossiles. Les émissions de Co2 n’ont jamais autant progressé qu’entre 2000 et 2010. « Si l’on veut rectifier la trajectoire, il n’y a pas de mystère : il faut mettre un prix au carbone avant 2020 » assurent les auteurs du projet.

Problème de gouvernance

Un des intérêts de ce mécanisme de bonus-malus, destiné à terme à mettre en place un marché du carbone transnational, serait d’instaurer une gouvernance effective du carbone. « Tous les marchés du carbone ont souffert de problèmes de gouvernance, il faut établir un système commun de MRV (monitoring, reporting, verification) » assurent les auteurs du projet. L'UNFCCC, le bras armé de l'ONU sur le climat, serait chargé d'organiser le mécanisme, tandis que les financements qui en seraient issus seraient gérés par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.

Transférer 100 milliards de dollars du Nord au Sud

Car ce nouveau mécanisme entraînerait des transferts massifs entre les pays du Nord et ceux du Sud. A titre comparatif, le Mécanisme de Développement Propre prévu dans le cadre du protocole de Kyoto n'a entraîné que 300 millions d'euros de transferts du Nord vers le Sud, et se trouve actuellement au point mort.

En pratique, l’idée est de démarrer avec un prix théorique de la tonne de CO2 à 7,5 dollars, ce qui est grosso modo le prix du carbone aujourd’hui sur le marché européen (6 euros la tonne). À ce prix, les États-Unis devraient par exemple payer 34 milliards d’euros par an pour financer leur surplus carbone, la Chine aurait de son côté une addition de 15 milliards, et l’UE de 10 milliards. À l’inverse, l’Inde recevrait l’essentiel de cette manne (38 milliards d’euros).  La tarification initiale du carbone serait volontairement faible, pour faciliter l’acceptation du mécanisme, l’important étant de mettre en place un marché transnational.

Parmi les contributeurs potentiels, deux acteurs sont identifiés par la Chaire comme clés : les pays producteurs de pétrole, et la Chine.

« Si la Chine soutient le projet, il sera difficile pour les autres blocs, notamment les États-Unis, de dire non  » assure Christian de Perthuis qui estime que « les clés d’un accord sur le climat sont en Chine »

Pour l’heure, ce projet de bonus-malus international n’a pas de soutien étatique officiel. Mais ses auteurs estiment qu'il bénéficient d'un atout majeur. « L’intérêt de ce système, c’est qu’il est simple : tous les politiques peuvent le comprendre. Ce qui n’est pas le cas des mécanismes actuels, notamment le marché du carbone européen ! » relève Christian de Perthuis.

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Les laboratoires du Department of Energy en appui de la recherche agricole

Aux USA, la sécurité alimentaire est un pan important de la sécurité nationale, de même que l'approvisionnement énergétique. Ces deux domaines sont directement reliés à l'agriculture.

Drone helicopter - Crédits : yogesh

Les collaborations entre agences fédérales des U.S.A. ne sont pas très courantes. Pourtant, les deux agences responsables de l'agriculture et de l'énergie ont une longue histoire de travail en commun. En effet, la mission principale du Département américain de l'Energie (U.S. Department of Energy - DoE) est d'assurer la sécurité et la prospérité nationales en répondant aux défis énergétiques, environnementaux et nucléaires par le biais de solutions scientifiques et de technologies innovantes [1]. La sécurité alimentaire est un pan important de la sécurité nationale, de même que l'approvisionnement énergétique. Ces deux domaines sont directement reliés à l'agriculture.

Source : BE Etats-Unis

Les résultats de la recherche fondamentale du DoE trouvent parfois une application dans un domaine que l'on pourrait penser éloigné des problématiques énergétiques. Le développement de la technologie GPS, des drones, de l'imagerie hyperspectrale, du séquençage génotypique, du conditionnement des matières premières énergétiques et des biocarburants a en effet directement bénéficié à la première agriculture au monde, domaine crucial de l'économie américaine, piloté au niveau fédéral par l'U.S. Department of Agriculture (USDA).

L'USDA est de fait responsable de la recherche agricole, bien que les scientifiques du DoE soient à l'origine de nombreuses avancées notables dans ce domaine. Bien que ces deux départements ne communiquent pas beaucoup sur leurs échanges, la coopération entre l'USDA et le DoE continue et produits des résultats concrèts. Point sur les domaines concernés et les laboratoires impliqués.

Système de positionnement global (GPS)

Les premières collaborations ont eu lieu dans les années 1990, lorsque le concept d'un tracteur auto-guidé était encore du domaine de la science-fiction. L'Idaho National Laboratory (INL), à Arco, travaillant sous l'égide du DoE, a mis en place un GPS expérimental qui a permis le guidage autonome d'un tracteur d'un producteur de pommes de terre, à l'aide d'un boitier électronique. Ce laboratoire est l'un des trois laboratoires de l'Ouest (avec le PNNL et le JGI, cf. ci-dessous) qui ont été à l'origine des plus importantes percées agricoles du pays.

Le projet de GPS visait à démontrer que l'utilisation de systèmes de guidage à faible coût était possible et utile pour l'agriculture. Le laboratoire, qui a collaboré avec des scientifiques de l'Université d'Etat de l'Utah et une entreprise travaillant pour le fabricant AGCO, a utilisé la technologie développée pour le Mars Rover de la NASA. Aujourd'hui, la grande majorité des tracteurs est équipée d'un système de guidage, à faible cout, permettant aux agriculteurs de mieux positionner et suivre leurs actions.

Recherche sur le génome des plantes

En juin dernier, le Joint Genome Institute (JGI), département du Lawrence Berkeley National Laboratory, laboratoire du DoE à Berkeley, en Californie, est à l'origine de trois publications distinctes sur le génome séquencé des agrumes, du soja et de l'eucalyptus [2].

Le JGI a été créé à la fin des années 1990 pour accélérer la cartographie du génome humain. L'institut, dont l'un des scientifiques a remporté le prix Nobel pour la caractérisation de la voie photosynthétique végétale (Melvin Calvin, 1961), a recentré son activité en 2003 vers les plantes, les champignons, les microbes et les algues. Ces recherches mobilisent environ 1 200 collaborateurs. Environ 30% de la recherche sur le séquençage génétique de l'Institut est focalisée sur la sélection de plantes dont la biomasse est facilement transformable pour la production de biocarburants avancés issus de cultures ligneuses ou des résidus agricoles.

L'institut - financé à hauteur de 69 millions de dollars annuels par le Bureau de la Recherche Biologique et Environnementale du DoE - étudie également la tolérance à la sécheresse et la résistance des cultures aux champignons et aux insectes. Le JGI étudie également dans le Midwest, l'influence des micro-organismes sur la productivité du sol vierge par rapport à des sols qui ont été continuellement exploités.

Plus au sud, le Los Alamos National Laboratory (LANL), l'un des deux laboratoires aux Etats-Unis habilités à travailler à la conception d'armes nucléaires, mène des recherches multidisciplinaires dans des domaines variés, tels que la sécurité nationale, l'exploration spatiale, les énergies renouvelables, la médecine, la nanotechnologie et les supercalculateurs. Le LANL contribue également aux avancées dans le domaine du génotypage des plantes par la création récente du National Agriculture Genotyping Center (NAGC) [3].

La mise en place de ce projet fait suite à un partenariat entre le LANL et la très puissante National Corn Growers Association, dans un contexte de réduction des budgets de l'USDA. Le DoE a signé dans ce cadre un protocole d'entente avec cette dernière, qui utilise déjà les séquences et les marqueurs d'ADN pour la sélection de nouvelles variétés de cultures.

Imagerie hyperspectrale au profit de la conduite culturale

L'observation des parcelles constitue une part importante du métier d'agriculteur, dans l'objectif de détecter les stress culturaux (hydrique, ravageurs, minéraux, etc.) dès les premiers signes visibles. Il est néanmoins connu que des signes de stress visibles à l'oeil nu ne sont que la partie visible de l'iceberg, car à ce stade le processus de stress est déjà largement engagé, et les conséquences peuvent être irréversibles pour la plante. L'imagerie hyperspectrale peut permettre d'anticiper ces stress, à condition de disposer d'une vue aérienne de la parcelle.

Il y a seulement cinq ans, les capteurs hyperspectraux - capables d'analyser une grande partie du spectre électromagnétique - pesaient près de 150 kilos. Transporter ces instruments lourds en altitude pour obtenir une vue aérienne nécessitait l'utilisation d'avions de tourisme. L'INL, en collaboration avec une société privée, a développé une caméra hyperspectrale ne pesant que 4 kilos, assez légère pour être monté sur un drone, réduisant considérablement les coûts engendrés par la collecte de données [4].

Cet outil doit permettre de détecter les stress culturaux au moins cinq jours avant qu'ils ne soient visibles à l'oeil nu. Les chercheurs en l'imagerie hyperspectrale de l'INL cherchent actuellement à déterminer quelles bandes du spectre sont les plus utiles à la compréhension des conditions de cultures particulières, telles qu'un stress hydrique ou une pression sur les cultures due aux ravageurs. L'objectif est de diagnostiquer les "signatures spectrales" de ces conditions spécifiques sur le terrain.

L'INL et l'Idaho State University ont lancé un projet pluriannuel visant à développer les outils nécessaires pour analyser ces signatures spectrales, afin de prédire les stress des cultures [5]. Les essais ont débuté par l'analyse d'images hyperspectrales de cultures en serre (conditions éprouvées), puis par leur comparaison aux images prise en conditions réelles de parcelles champs agricoles de l'Idaho du sud-est. Les agriculteurs participants ont dû accorder aux chercheurs la permission d'accéder à leurs champs pour confirmer l'exactitude de l'analyse hyperspectrale.

Cette approche pourra également avoir des applications pour mesurer la profondeur du manteau neigeux et la teneur en eau, pour la prévention des incendies et pour évaluer qualité de l'eau. Le Pacific Northwest National Laboratory (PNNL), un autre laboratoire du DoE est également engagé dans ces recherches.

Commercialisation de la biomasse

L'INL est un des laboratoires leaders spécialisés dans la recherche visant à surmonter un obstacle important à la production de biocarburants de 2nde et de 3ème génération : la nécessité de prolonger la durée de vie des matières premières et de les transformer en matière uniforme, légère et compacte pour le transport vers les usines de raffinement [6].

Une unité spécifique, dédiée à la transformation des matières premières (Biomass Feedstock Process Demonstration Unit), ouverte en 2011, permet aux chercheurs de réaliser les essais de mélange et de transformation de la biomasse pour répondre au cahier des charges des raffineries (coût, qualité, teneur en matière sèche, taille des particules et niveau d'humidité). Les matières premières comme les cannes de maïs sont transformées sous forme de granulés, alors que les matières ligneuses sont souvent carbonisées en un produit qui ressemble au charbon de bois.

L'objectif de ces recherches est de rendre la commercialisation de la biomasse généralisable, car avec les méthodes de transformation actuelles, seule la biomasse récoltée dans un faible rayon autour de l'usine de raffinement peut être transformée. Cela représente un intérêt pour les agriculteurs qui peuvent alors dégager une valeur marchande de leur biomasse résiduelle, et pour les raffineries qui étendent leur rayon d'approvisionnement, ce qui permet des installations de plus rentables et indépendante des fluctuations saisonnières.

Fabrication de biocarburants

Le Pacific Northwest National Laboratory à Richland, Washington (PNNL) est spécialisé dans la conversion de ce type de matières premières en biocarburants de 2nde et de 3ème générations. Le PNNL est parmi les principaux utilisateurs des produits de la recherche de l'INL et fournit en retour des commentaires précieux sur leur comportement et rendement dans ce cadre.

Le PNNL étudie la production de biokérosène, ainsi que de biodiesel pour les équipements lourds. En l'absence d'alternatives, il est probable que ces carburants industriels seront encore utilisés pendant de longues années, à la différence du parc automobile américain, qui évolue doucement vers les véhicules électriques [7].

Pour minimiser les coûts de production de biocarburants et ajouter de la valeur à la biomasse qui est produites dans les exploitations agricoles, le PNNL a entrepris des recherches pour valoriser les sous-produits de la transformation des matières premières en biomasse, en tant que plastiques, savons et détergents par exemple. Il y a environ cinq ans, ces recherches ont permis au PNNL de développer un produit chimique dérivé de la glycérine - un sous-produit de la production de biodiesel - qui est maintenant commercialisé par une société privée, notamment en tant que liquide de refroidissement de moteur [8].

L'ensemble de ces exemples récents de collaborations scientifiques illustre une constante de la recherche fondamentale : les domaines d'applications, s'il y en a, sont largement imprévisibles. Valoriser les résultats des scientifiques des laboratoires fédéraux dans un domaine différent de celui imaginé à l'origine peut donc légitimement constituer une des pistes pour optimiser les ressources. Et même peut-être en tirer des revenus ?
                                                          
Pour en savoir plus, contacts :           

- National Agricultural Genotyping Center - Site internet : http://www.genotypingcenter.com/
- Idaho National Laboratory : http://www.inl.gov
- Pacific Northwest National Laboratory - Site internet : http://www.pnl.gov/
- Los Alamos National Laboratory - Site internet : http://www.lanl.gov/
- Joint Genome Institute - Site internet : http://jgi.doe.gov/
           

Sources :
           
- [1] Article - About us - U.S. Department of Energy - http://energy.gov/about-us
- [2] Article - Extraordinary month for JGI science - The Primer - Août 2014 - Joint Genome Institute - http://redirectix.bulletins-electroniques.com/GFMes
- [3] Article - National Agricultural Genotyping Center - National Corn Growers Association - http://redirectix.bulletins-electroniques.com/La6iA
- [4] Article - INL's unmanned aircraft survey the landscape with a focus on the environment - Idaho National Laboratory - http://redirectix.bulletins-electroniques.com/O5BZP
- [5] Article - Idaho State University researchers, partners employ unmanned aircraft systems to detect threats to crops in Southeast Idaho - Idaho State University - ISU Headlines - Mai 2014 - http://www.isu.edu/headlines/?p=6006
- [6] Article - Workshop highlights new resource, goals for developing biomass into tradable commodity - - Idaho National Laboratory - http://redirectix.bulletins-electroniques.com/S08Ot
- [7] Article - What is the future of Electric vehicle in fleet? - Green Fleet Magazine - Septembre 2013 - http://redirectix.bulletins-electroniques.com/X8U6f
- [8] Article - Propylene glycol from renewable sources - The Better World Project - Association of University Technology Managers - 2012 - http://redirectix.bulletins-electroniques.com/ZDqdw

Rédacteurs :         

- Simon Ritz, deputy-agro@ambascience-usa.org ;
- Retrouvez toutes nos activités sur http://france-science.org.

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Le 31 Octobre 2014

Deuxième conférence "LACI Global Showcase" / Los Angeles - octobre 2014



Une conférence sur les technologies propres s'est tenue à Los Angeles les 6 et 7 octobre 2014. Organisé par le Los Angeles Cleantech Incubator (LACI) pour la deuxième année consécutive, cet événement a rassemblé un public international d'environ 550 personnes, composé principalement d'investisseurs, d'entrepreneurs et de décideurs politiques. Pendant deux jours, de nombreux intervenants se sont succédés, pour évoquer le développement des technologies respectueuses de l'environnement.

Source : BE Etats-Unis

La Californie, un leader environnemental et technologique

L'excellence de la Californie en matière environnementale a été rappelée à de nombreuses reprises. La majorité des acteurs ayant pu s'exprimer ont insisté sur l'importance des décisions politiques dans les processus économiques. Surmonter les risques climatiques passe certes par des innovations technologiques, néanmoins ces innovations doivent être encouragées et soutenues par les pouvoirs publics. Ce point a été mis en avant par Gina Mc Carthy (Environmental Protection Agency), Mary Nichols (California Air Resource Board), Matt Rogers (McKinsey) et Jennifer Grandholm (ancienne gouverneur du Michigan).

L'organisateur de la conférence, le LACI, est l'exemple même de l'excellence californienne en matière d'innovation technologique. Le LACI est un des trois incubateurs soutenus par le ministère américain de l'énergie. En septembre 2014, le LACI a été sélectionné comme le sixième incubateur mondial par le UBI Index, qui prend en compte 800 organisations dans 67 pays [1] .

Un forum d'affaires international

L'interaction entre investisseurs et entrepreneurs a été grandement favorisée au cours du forum. Des présentations ont été en effet effectuées à la fois par des fonds d'investissement, toujours à la recherche de projets à soutenir (avec des investissements de l'ordre de un à dix millions de dollars), et par des entreprises (en particulier des start-ups) souhaitant accélérer leur croissance grâce à des financements extérieurs. Ces entreprises étaient spécialisées dans les véhicules électriques, la gestion des réseaux d'électricité, le transport de biens, l'impression en trois dimensions, et les panneaux solaires.

De nombreux espaces étaient disponibles pour les entreprises et organisations partenaires de la conférence, qui pouvaient ainsi promouvoir leurs activités et être en contact direct avec le public présent. Chaque partenaire avait à sa disposition une table, et pouvait distribuer de la documentation. Les sponsors de l'événement, tels que JP Morgan Chase ou le South Coast Air Quality Management District, pouvaient intervenir directement au micro.

Un contexte favorable au développement des énergies vertes à Los Angeles

Le LACI compte organiser un évènement similaire dans son format et ses thèmes, mais de plus grande ampleur en terme de participants, du 5 au 7 octobre 2015. Cette initiative semble tout à fait logique, au vu du contexte politique actuel à Los Angeles. Le maire Eric Garcetti et son administration sont en effet très actifs sur les questions environnementales.
- La ville de Los Angeles souhaite par exemple mettre l'accent sur le développement de l'énergie solaire, en triplant la capacité électrique des panneaux photovoltaïques d'ici à 2016 [2] .
- La protection des zones côtières et des rivières est aussi une priorité, qui fait l'objet d'un investissement de 500 millions de dollars [3]. Il est important de souligner que la zone du port de Los Angeles - Long Beach, par où transitent 40% des importations américaines, est menacée par l'élévation du niveau de la mer [4].
- De nombreux projets de réhabilitation urbaine sont planifiés, notamment en matière de réhabilitations des quartiers du centre-ville et de la rivière, avec des aménagements d'espaces verts et le développement de modes de transport propres [5].
- La sécheresse exceptionnelle qui affecte en ce moment le Sud de la Californie (année la plus sèche depuis 1977) [6] a provoqué des réponses d'envergure de la part des pouvoirs publics locaux. Grâce à la mise en place d'incitations, et à une uniformisation des régulations, la consommation d'eau a diminué à Los Angeles en 2014 par rapport à 2013 [7].

La ville de Los Angeles a fait de l'innovation environnementale une de ses priorités, et constitue un laboratoire d'initiatives et de politiques associant secteur public et privé, afin de répondre aux défis posés par le changement climatique.

Pour en savoir plus, contacts :           

- "Première édition du 'Cleantech LA Global Showcase' à Los Angeles" - CHANSAVANG Viviane, AGENES Fabien - 28/11/2013 - BE Etats-Unis numéro 349 - http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/74431.htm
- Site Internet du GloSho 2014 : http://www.glosho.org

Sources :           

- [1] UBI Index, "University Associated Business Incubator Rankings 2014", http://ubiindex.com/rankings/
- [2] Rick Orlov, Los Angeles Daily News, "Los Angeles Mayor Eric Garcetti and city make it easier to install a solar energy system", http://redirectix.bulletins-electroniques.com/Tn5RR
- [3] Eric Garcetti, "An Unmatched Leader on the Environment", http://www.ericgarcetti.com/environment_issue
- [4] Andrew Khouri, LA Times, "Congestion worsens at L.A. - Long Beach ports as holidays near", http://redirectix.bulletins-electroniques.com/wTRm2

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Le 1 avril 2015

Climat : « on mobilisera sur les solutions, pas sur le constat » défend Nicolas Hulot


Sénat : Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, commission du développement durable (Sénateur(s) : Maurey Hervé, Raffarin Jean-Pierre)

Audition de Nicolas Hulot, envoyé spécial du Président de la République française pour la protection de la planète, sur la Conférence Paris climat 2015 (COP21)

Durée : 45:38 / Date : 01/04/2015

Pour plus d'informations : Sénat

Climat : « on mobilisera sur les solutions, pas sur le constat » défend Nicolas Hulot

« Nous avons des motifs d’être inquiets, du moins de ne pas tomber dans un optimisme béat », a confié Hervé Maurey, président de la commission du développement durable du Sénat à Nicolas Hulot, auditionné ce matin par le Sénat.

Source : Public Sénat par Natacha Gorwitz

Avant minuit, hier soir tous les « pays prêts à le faire » devaient présenter leur « contributions nationales » pour la lutte contre le réchauffement climatique. A huit mois de la Conférence de Paris qui doit aboutir à un nouvel accord international sur le climat, seuls 3 pays sur les 195 pays participants ont communiqué leurs objectifs de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Or, en tant que pays hôte, « la France joue gros dans cette affaire » souligne l’ex-premier ministre, Jean-Pierre Raffarin.

Conscients de l’enjeu, les sénateurs étaient nombreux ce matin. « Le monde qu’il y a autour de la table témoigne de [notre] intérêt » souligne Jérôme Bignon qui a confirmé auprès de l’envoyé spécial du président de la République pour la protection de la planète : « on est à disposition et on est mobilisé ».
« Le scepticisme n’est plus un argument opposable »

 « Tous les modèles scientifiques montrent que « les conséquences » du réchauffement climatique, au-delà de deux degrés, seront « irréversibles ». Aujourd’hui, le « constat » est avéré et « le scepticisme n’est plus un argument opposable » a martelé Nicolas Hulot. D’ailleurs, parmi les « 195 Etats » participants, aucun ne s’y risque : « pas un ne conteste la responsabilité de l’humanité » dans le réchauffement climatique.

Actuellement, nous sommes « à un carrefour », ajoute-t-il : « On a fait le constat », mais « on n’a pas encore réalisé ce qu’il faut développer et ce à quoi il faut renoncer ». « Je comprends l’état de sidération » confie-t-il puisqu’« on découvre que la norme, c’est pas l’abondance mais la rareté ». Or, « la rareté ça se pilote » commente Nicolas Hulot, sinon « c’est la pénurie ».

« A Lima, certains ont sous-estimé la défiance des pays du Sud »

« A Lima, certains ont sous-estimé la défiance des pays du Sud ou des pays les plus vulnérables à l’égard des promesses annoncées à Copenhague ». Il avait été question de doter le « Fond Vert » de « 100 milliards » de dollars par an d’ici « 2020 ». Aujourd’hui, « ces pays ne nous croient plus » explique Nicolas Hulot. Promis par les pays industrialisés lors de la conférence de Copenhague en 2009, le Fond vert pour le climat n’a dépassé que la barre 10 milliards à Lima en décembre dernier. Il faut « aborder ces sujets dans la transparence et la confiance », ajoute Nicolas Hulot, notamment à l’occasion du « G7 » et surtout, du « G20 » qui aura lieu deux semaines avant la COP21.

La Conférence sur le climat tombe en même temps que les régionales, « une coïncidence malheureuse »

« Le calendrier n’est pas opportun », regrette Hervé Maurey puisque la Conférence sur le climat « tombe en même temps que les élections régionales ». Même si cela « a été signalé », aujourd’hui c’est « acté », ajoute le président de la Commission du développement durable du Sénat. « Je le déplore également », surenchérit Nicolas Hulot. C’est une « coïncidence malheureuse », ne serait-ce qu’ « en termes de politesse » à l’égard des 195 pays que la France accueille sur son sol pour la COP21. Apparemment, il n’aurait pas été possible de faire autrement, en raison de « problèmes constitutionnels », précise l’envoyé spécial du président de la République pour la protection de la planète.
« Pour convaincre, il faut dessiner un horizon désirable »

Si, la Chine était arrivée « à reculons à Copenhague », le plus gros émetteur de gaz à effet de serre de la planète s’« inquiète » aujourd’hui des conséquences de « la pollution » et s’est « mobilisée » sur le sujet, précise-t-il. De même, le risque d’ « instabilité » que présente le réchauffement climatique, est « un argument de poids auprès des Etats-Unis » et auquel « les Républicains » sont sensibles précise Nicolas Hulot. « En moyenne », « 27 millions de déplacés » en raison du réchauffement climatique, un chiffre qui pourrait atteindre « plusieurs centaines de millions » au « milieu du siècle ».

Certes, les négociations en cours prennent parfois l’allure de « tragiques parties de poker » « où chacun abat ses mauvaises cartes en premier ». Nicolas Hulot en est convaincu, « on mobilisera sur les solutions, plus que sur le constat ». «  J’entends trop souvent : ‘comment peut-on faire autrement ?’ » déplore-t-il. Si « nos institutions ne sont pas adaptées aux enjeux globaux », « nous ne sommes pas pris en défaut sur le modèle de transition énergétique » explique-t-il d’un ton rassurant. La « seule » question à se poser, c’est « quand et à quel rythme » nous entreront dans « l’économie bas-carbone ». « Pour convaincre, il faut dessiner un horizon désirable » insiste-t-il pour conclure.

La question des « financements », une « priorité »

D’un point de vue pratique, pour atteindre « les objectifs », il faut « des instruments pour les réaliser ». L’accès aux « financements », c’est « une priorité », précise Nicolas Hulot. « Si on ne donne pas un prix au carbone » nous ne pourront « pas rentrer dans une économie bas-carbone » insiste-t-il. Aujourd’hui, il y a « 650 milliards de dollars de défiscalisation aux énergies fossiles » dans le monde, précise-t-il autant de fonds qu’ « il faut flécher » vers « des modèles » de transition énergétique. L’autre « sujet difficile », c’est la question de « la transparence » et de « l’évaluation de ces engagements » puisque cela touche à la « susceptibilité » des Etats.

Une chose est sure, « le monde ne s’arrêtera pas » en cas d’ « échec à Paris », souligne Nicolas Hulot. Mais, ça provoquerait un « sérieux coup d’arrêt » aux négociations. A terme, cela serait « lourdement préjudiciable pour nos économies et nos démocraties ». Cette conférence sur le climat, « c’est l’occasion ultime de nous retrouver sur ce qui nous rassemble » a-t-il insisté.

L’envoyé spécial du président de la République pour la protection de la planète a appelé les sénateurs à se mobiliser, que ce soit à travers les groupes d’amitié, ou plus largement, sur le terrain, aux côtés de la société civile. A leur demande, il s’est engagé à fournir aux parlementaires une « feuille de route » à suivre sur les actions possible à conduire. En outre, une proposition de résolution sera examinée par le Sénat sur les objectifs à l’occasion d’un un débat public dans l’hémicycle.

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