Epuisement de la ressource halieutique : ne nous trompons pas de cible !

Réaction suite à l'émission du samedi 25 octobre 2008 sur France Inter, CO2 mon amour consacrée à la pêche : Quels avenirs pour la ressource halieutique et l'environnement marin ?
Je voulais réagir au livre "Plus de poisson à la criée" de Frédéric Denhez après le livre "Une mer sans poissons". D'après ces deux livres parus en 2008, l'épuisement de la ressource halieutique est lié à la surpêche (augmentation de l'effort de pêche) qui elle-même dépend des subventions attribuées au secteur de la pêche. Pour simplifier, la cause de la disparition des espèces de poisson est l'activité de pêche elle-même. La réponse de la politique commune des pêches en Europe (PCP): moins de bateaux, moins de pêcheurs et bientôt mise en place des QIT (Quota individuel transférable). L'objectif est de privatiser la ressource halieutique. Les grandes sociétés de pêche européennes (Pescanova, Intermarché,...) et les multinationales de la pêche norvégiennes et japonaises qui par ailleurs ont été les plus subventionnées, n'attendent que celà, au détriment du secteur artisanal de la pêche côtière de nos pays européens.
La richesse de la mer dépend aussi de l'état de santé de la bordure côtière.
Un aspect rarement abordé dans la crise de la ressource halieutique est la pollution côtière d'origine agricole, urbaine et industrielle ainsi que la destruction des écosystèmes littoraux. C'est pourtant dans ces zones côtières que la plupart des espèces capturées se reproduisent et que les alevins se nourrissent... L'avenir de la pêche dépend de ces zones littorales qui ont été fragilisées ou même détruites parfois sur des superficies très importantes : on parle de zones mortes (Mer Baltique, Golfe du Mexique,...).
Le poids de la pêche minotière dans le monde est négligé.
Face à la raréfaction de la ressource halieutique, pourquoi ne parle-t-on jamais de la pêche minotière ? Cette activité de type industriel qui transforme les captures en farine et en huile de poisson, est l'activité de pêche la plus importante dans le monde. Entre 25 à 30 millions de tonnes de poisson (soit près de 30% des captures mondiales) sont transformés en farine et en huile. Cette farine et cette huile de poisson servent à nourrir le bétail (porc et volaille), et maintenant surtout des poissons d'aquaculture (saumon, truite, bar, daurade et turbot). Dans l'UE, le Danemark est le premier pays minotier. La pêche minotière de l'UE représente un tonnage supérieur aux prises réunies de l'Espagne et de la France, mais, curieusement, la Commission place cette activité de pêche à part, alors qu'elle a des conséquences non négligeables sur la chaîne alimentaire.
N'y aurait-il pas un lobbying (pêche minotière + aquaculture industrielle) au niveau européen et même mondial pour étouffer les vrais problèmes de la pêche ? Un saumon d'élevage de 2 kg consomme l'équivalent de 10 à 12 kg de poisson sauvage (réduit en farine et en huile) !
En France, les débarquements en criée diminuent, par contre la consommation des produits de la mer augmente (de 30 à 35 kg/hab/an en moins de 10 ans) et tout particulièrement la consommation des espèces élevées (saumon, bar, daurade, crevette...) qui ne passent pas en criée. Ces espèces sont élevées, conditionnées et distribuées par des multinationales cotées à la bourse d'Oslo ou de Santiago du Chili ; les quatre sociétés les plus importantes contrôlent près de 50% de la production mondiale de saumon d'élevage.
Philippe FAVRELIERE

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